Je suis avec les objets et les choses et je me dresse contre la tristesse du quotidien morose. Tristesse que l’on s’est faite, que l’on a tissée petit à petit sans vraiment bien s’en rendre compte, au fil des années. Chaque cœur ignorant y a mis du sien. Et ça s’est répandu progressivement. Maintenant elle flotte dans l’air, lourde, envahissante, comme un brouillard opaque et gluant. Et elle se déplace de par les rues et les cités. Elle guette, s’impose. Elle est devenue si forte et présente que maintenant c’est elle qui donne vie et dirige. Qui donne mort plutôt. Elle a pris les commandes du mouvement des vivants. Elle ordonne et gouverne. Impératrice du désordre dissimulé, du vide faussement comblé, de la violence à peine muselée. Dictature des cœurs arrachés, des regards égarés, des mains éparpillées, des corps mutilés. Marche incessante et enivrante des robots programmés dans la cité noire et fermée de l’enfer ainsi crée. Crissement insupportable et constant de la rutilante mécanique, séductrice, destructrice.

Les pieds titanesques de l’être d’acier aux yeux bleu-glacé et blasés écrasent la pauvre chair déjà oubliée, délaissée, de l’humanité éplorée. Ambiance nerveuse et électrique, annonciatrice d’une menace pesante qui gronde, gronde et s’avance petit à petit. Concentration et préparation de la gigantesque explosion de sang et de faiblesse, de remords et de détresse qui s’apprête à dévaster le monde. A emplir les cœurs vides, à noyer les âmes cupides. Universel combat à la violence extrême entre les immenses montagnes acides et avides des forteresses vides et le fleuve rouge du vivant en mouvement, bouillonnant de colère et d’amère revanche. Le hurlement convulsif et brûlant, sans repères, sans limites, de la confrontation de deux mondes, s’apprête à bouleverser, à déchirer le grand silence si lâche et omniprésent installé depuis tant d’années, pesant et arrogant, sur la tête de l’humanité innocente et acharnée qui ne pouvait, impuissante, arriver à le déloger.