Journal d'une ménagère zébrée

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Mes "états j'ère"

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mercredi, mai 18 2005

Processus personnel d’évolution de vie

Sans rentrer dans les détails je dirais que ma vie, comme tant de vies, est faite d’une succession d’expériences diverses, collectionnées jusqu’à présent comme des morceaux de puzzle éparpillés. Lieux, boulots, rencontres, activités… Mais depuis peu de temps j’ai le sentiment que tous ces morceaux se rassemblent petit à petit. A défaut de se ressembler peut-être vont-ils progressivement s’assembler, je crois bien que c’est ce que je souhaite. Et peut-être de le souhaiter fortement va-t-il permettre que cela se réalise...Rentre en compte ici un élément non négligeable dans la vie en général : la foi.

Avoir foi en ce que l’on vit, en ce que l’on est avant tout. Avoir foi en la Vie. Pas facile me direz-vous… Mais j’y travaille depuis longtemps. Après s’être placée sur mon chemin à un moment donné de ma vie, la question de la foi est devenue de plus en plus importante pour moi, primordiale même. Puisque là se trouve à la fois le centre et le départ de toute chose. A chacun sa foi et son cortège de croyances. Qu’importe les croyances. C’est l’énergie de vie qui compte le plus, ce qu’il y a d’universel derrière tout type de foi. Ce n’était pas le tout de rencontrer la foi. Fallait-il, après l’avoir intégrée, la vivre. Je me rends compte d’ailleurs, depuis relativement peu de temps, qu’il y a une bien grande différence entre la théorie et la pratique.

On peut toujours explorer le monde mental et élaborer de belles théories sur la quête de Dieu. Se créer même un univers idéal empli de belles choses et de grands sentiments. J’ai vécu cela. Mais je pense que l’on ne peut véritablement parler de foi et l’expérimenter que si on la confronte à la vie concrète, à ce qui est « extérieur » à nous-même. Chaque chemin est unique, en ce qui me concerne j’ai rencontré la foi au bout d’une profonde solitude. Et puis tout au long processus de transformation et d’évolution que l’on nomme la vie, j’ai été amenée, poussée parfois malgré moi à la faire descendre (ou remonter ?) en moi-même jusqu’au concret. J’imagine qu’il existe de nombreuses personnes pour lesquelles il se passe l’inverse : elles rencontrent la foi à travers une situation concrète (souvent malheureusement un accident, une maladie,…) qui les amènent à découvrir en elles-mêmes l’univers intérieur de la spiritualité.

Le plus important c’est que vie intérieure et vie concrète se rejoignent. Et qu’à travers la foi il y ait réconciliation et fusion des différents plans d’existence : plan mental, physique, etc. Voilà d’ailleurs pourquoi on se retrouve souvent à vivre des choses qui ne semblent pas avoir de liens entre elles : parce qu’en soi-même on est « morcelé », partagé entre les choses du cœur, les choses du mental, du corps aussi. Pour l’avoir souvent ressenti et puis constaté dans ma propre vie, je pense que ce que l’on vit est tout simplement à l’image de ce que l’on est en soi-même. On peut donc considérer la foi comme étant l’élément de jonction, le moteur à la fois partout et nulle part qui peut permettre de retrouver l’harmonie dans tout ça. Telle est donc ma quête personnelle, ma ligne de conduite je dirais plutôt : Que tout en moi et puis dans ma vie, se rassemble et prenne sens.

Alors si j’en viens à la question de l’écriture et bien je dirais que pour moi elle n’est pas une fin en soi mais plutôt une sorte de témoignage, celui de mon « processus personnel d’évolution de vie »… Peut-être est-ce une question de choix - avant tout psychologique-, la vie en elle-même reste pour moi la chose la plus importante, au-delà de tout ce que l’on peut faire ou avoir. D’ailleurs je n’ai jamais su et ne sais toujours pas qu’est-ce que j’aurais souhaité, qu’est-ce que je souhaite faire dans la vie. Je ne me suis jamais sentie de vocation particulière, ni même d’intuition sur ce que j’allais vivre. J’ai souvent eu l’impression d’avoir été montée à l’envers : tant de gens arrivent sur terre avec un bagage particulier, des idées des désirs, une mission à remplir… Moi je suis là à ne toujours pas savoir qu’est-ce que je suis venue faire concrètement.

Alors je vis chacun de mes jours à essayer de comprendre et expérimenter ce que me donne à vivre la vie, puis à espérer ainsi me constituer mon bagage existentiel, ma raison d’être, ma mission de vie. A défaut de savoir qu’est-ce que j’aimerais vivre, je fais la démarche inverse de prendre ce que me donne la vie et de faire avec. Et c’est ainsi que j’ai appris à aimer la vie. Après être passée par des phases de souffrance existentielle, qui justement par contraste rendent la vie d’autant plus belle et précieuse.

Je ne m’impose pas à la vie, c’est elle qui me modèle, comme une sculpture fidèle et soumise. Et moi je modèle le regard que je porte sur elle. C’est un échange subtil, accompagné d’un long travail dépuration. Tandis qu’elle m’amène à me dépouiller de matières inutiles et encombrantes comme la peur, la culpabilité, de mon côté le regard s’affine, lui renvoyant chaque jour davantage l’image d’un joyau. Concrètement pour moi la vie est une aventure totale, intérieurement c’est un lien d’amour qui se tisse à travers un travail de co-création. La vie est cet espace de liberté et de création qui se trouve entre nous … et nous-même. Nous avant, nous après. Nous humain et nous divin. J’ose dire qu’en fin de compte nous sommes créateur de notre propre vie.

samedi, mars 26 2005

Une vision "spirituelle" du corps

Le corps représente véritablement la frontière entre le monde intérieur et le monde extérieur. Il est comme une porte, le passage privé de chaque individu lui permettant l’accès personnel du monde extérieur au monde intérieur et inversement. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, du fait de son apparence concrète « solide », il ne représente ni une fin en soi, ni un commencement dans la manière d’être. Ce n’est pas quelque chose qui enferme ni ne représente un obstacle, une barrière.

Nous ne pouvons être notre corps d’une manière finie. Nous ne pouvons nous « poser » sur la sensation d’être, car le corps dans sa manière d’être, de se vivre, est un état intermédiaire entre une certaine façon d’être et une autre. Entre le monde intérieur et le monde extérieur. Nous pouvons dire quelque part que nous « sommes » ce que nous ressentons à travers le corps, mais nous ne sommes pas notre corps. Il ne nous possède pas non plus, si nous le décidons bien sûr.

Nous sommes totalement libres dans la manière de vivre notre corps, de l’être et si au-delà du corps nous expérimentons le côté « absolu » de l’être d’un point de vue spirituel, en s’étant ouvert à Dieu, en ayant atteint la dimension du Divin que nous portons en soi et bien nous pouvons nous rendre compte que le corps n’est qu’un état intermédiaire. Même si nous « sentons » la vie avec notre corps, l’expérimentation profonde de l’état d’être se passe bien au-delà du corps. Etant donné que l’être est avant tout une énergie de vie, le corps ne constitue qu’une « étape énergétique » que nous pouvons choisir de vivre de manière passive ou bien au contraire que nous pouvons « utiliser » pour intensifier ou élargir l’expérience énergétique que nous appelons la vie.

Aussi nous sommes totalement libre dans notre manière d’être et donc dans la manière de vivre le corps. Soit nous choisissons de vivre passivement notre vie et notre corps et à ce moment là nous « subissons » la vie sous tous ses aspects dont elle peut se manifester, notamment à travers le corps. Soit nous choisissons d’être maître de ce que nous vivons, de ce que nous sommes, sachant que ce que nous vivons dépend de ce que nous sommes. A ce moment là il y a deux options possibles : Nous pouvons vivre notre corps comme un véhicule dans lequel « nous arrivons », que nous utilisons puis à un moment donné que nous quittons, comme une location, au moment où l’on meurt.

Ou bien nous pouvons également choisir d’intégrer notre corps, de le devenir véritablement. A ce moment là si nous décidons de l’intégrer et de ne plus le quitter comme un objet qui aura été emprunté, alors il n’y a plus de mort physique. Intégrer son corps, c’est le devenir énergétiquement. Cela se passe sous la forme d’une sorte de transmutation par l’esprit de chaque partie du corps, chaque parcelle, chaque atome… Peut-être bien es-ce d’ailleurs le phénomène que nous appelons l’Ascension.

(le 26 mars 2005, à la veille de Pâques)

lundi, mars 14 2005

Lettre à l’être blessé qui est en chacun de nous

Je m’adresse à toi, être secret, être caché en moi. En même temps que moi tu es né, en même temps que moi tu as grandi. Sans le savoir, tu es le premier sur qui j’ai posé mon premier regard et l’être à travers qui j’ai posé mon premier regard sur le monde et mes premiers pas. Tout à tour, tu as été celui qui m’a accueillie, avec tendresse, avec fermeté aussi. Les bras maternels, la voix paternelle, le lien fraternel. Avec toi j’ai ri, j’ai joué, j’ai pleuré aussi. Tu m’as appris l’amour, la joie, le rêve, la spontanéité.

Et puis j’ai grandi jusqu’à ce que le monde pose sur moi son fardeau de souffrance. Ce lourd tribu dont il transmet un bagage à chacun pour la vie. Et j’ai découvert le manque, la tristesse, la douleur. Toi qui était miroir de ma joie de vivre tu es devenu le reflet de ma propre tristesse, l’image de ce qui me faisait mal. Alors, ne supportant plus cette relation qui était devenue comme un déchirement, j’ai rompu le lien avec toi.

Ne voulant plus vivre cette intimité douloureuse je t’ai rejeté et t’ai caché à un endroit où je ne risquais pas de te retrouver dans la vie : en moi-même. Miroir de mon âme blessée, je t’ai enfermé dans le noir de mon esprit, tout au fond de mes rêves éteints, pour t’oublier. Vivre sans reflet de ma vie me permettait d’ignorer la douleur. Ne plus sentir, ne plus souffrir. Mais je sais que je ne suis pas la seule à t’avoir enfermé dans ma prison oubliée, tant d’autres personnes ont ainsi enfermé l’être de leur vie en elle-même…

Et le monde va mal, le monde dépérit. Ce lourd bagage qu’il donne à chaque personne, à la mesure de ce que chacun peut porter, c’est dans le secret espoir qu’en partageant sa douleur, nous pourrons le libérer. Et ce monde qui est en attente c’est le tien, celui où l’on vit sans oublier, sans avoir peur, sans cacher ce que l’on ressent. Dans ce bagage se trouve la clé, pour le libérer il faut te libérer d’abord. Moi qui m’étais sentie trahie par cette souffrance entrant dans ma vie, je me suis trahie moi-même en te reniant de la sorte. Alors je m’en veux, mais l’heure n’est plus maintenant aux sentiments douloureux. Je sais que tu ne souhaites qu’une chose : c’est que je te libère et que je te redonne vie.

Alors, cher être caché en moi, après si longtemps tu es devenu un inconnu. Toi qui as porté l’ombre de ma conscience, qui es-tu ? Laisses-moi deviner…Tu as été à la fois ma mère, mon père, mon frère, mon professeur, mon ami(e), puis mon amant, chaque être inconnu que j’ai pu croiser aussi. Cet être que je suis et ne suis pas en même temps, l’Autre en moi qui crée le lien avec le monde. Tu es également la présence de Dieu en moi. Tu es ce qui me permet de devenir meilleure, ce qui me permet de devenir un jour un « être complet », sans manque, sans déchirement, sans souffrances. Alors je te demande pardon pour t’avoir rejeté et ne pas avoir cru en toi. Et je te demande du fond du cœur de me permettre de te retrouver…

lundi, février 21 2005

La séparation du monde

Lors de la création de l’univers, il y a eu la grande séparation. De l’Un Divin est né notre monde et avec lui la dualité. Nous nous sommes petit à petit éloignés de Dieu, Dieu-Père le soleil et Dieu-Mère la terre. Tout, au long de notre longue et courte histoire a contribué à nous individualiser, nous isoler ainsi de notre environnement. Pas seulement environnement physique, mais aussi environnement affectif. La terre mère est notre berceau dont nous nous sommes éloignés.

Et puis nous sommes maintenant arrivés à une sorte de paroxysme, c’est à dire un état individualisé tel que nous avons besoin de retrouver ce lien avec cet environnement qui nous a fait naître, qui nous a fait être. Mais en nous-mêmes. Nous avons emporté et transformé en évoluant ce contexte à la fois physique et affectif. Et comme il n’est plus « à l’extérieur » car nous avons rompu le lien, et ce faisant nous avons fait de l’extérieur quelque chose de figé, comme mort, c’est en nous qu’il faut le retrouver.

Après le basculement de la création du fait de l’avènement de la séparation, doit venir le basculement intérieur, le grand inversement. Avoir conscience que nous portons en nous notre propre monde et que c’est à nous, à travers le regard que nous lui portons, que nous pouvons choisir de lui porter, c’est à nous de le recréer autour de nous. En conscience, avec un regard nouveau. Le monde est entrain de mourir du fait qu’il est entrain de basculer. C’est l’ancien monde qui meurt pour laisser place au nouveau.

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Arrivés au point de basculement, à cet état d’individuation poussé à l’extrême, il se passe un phénomène de non retour : nous ne pouvons plus retourner en arrière. Tout ce qui était séparé, cloisonné, émerge dans une période (provisoire) de chaos durant laquelle tout remonte :
ce qu’on est, ce qu’on était, les réminiscences, les associations de pensées les impressions, les émotions, etc. Ce sont nos différents états d’être qui émergent en même temps et se mélangent : le spirituel, le mental, l’émotionnel. Tout semble rejaillir et s’étaler autour de nous comme pour appeler une nouvelle vision des choses et avec elle une nouvelle façon d’être. Nos différents états d’être correspondant à nos différents corps se mélangent comme pour mieux s’unir et aboutir à une vision unique et harmonieuse de la vie en nous, autour de nous.

Le soleil, qui représente Dieu-Père, l’énergie masculine, agit comme un miroir et révèle notre état mental tandis que la terre qui est notre berceau Dieu-mère, fait remonter de ses entrailles notre état émotionnel refoulé. Tout refait surface, comme un jaillissement de vie maintenue cloisonnée, refoulée trop longtemps. A part la dernière illusion encore présente de notre réalité physique cloisonnée, il n’y plus maintenant de réelle séparation intérieur/extérieur, masculin/féminin, physique/spirituel,…Tout est porté à rejaillir, à se mélanger et à fusionner. Pour arriver à une nouvelle réalité, celle unique crée par des êtres conscients, redevenus complets, en harmonie avec leur propre nature qui est une nature en vérité d’origine divine.

Alors il se peut que durant cette période de « chaos » l’on éprouve un profond sentiment de confusion, de désorientation et de peur. Dans ce cas il ne faut pas se laisser dominer par la peur, il faut rester confiant, centré en soi, centré en l’être divin que l’on porte en soi et qui est notre devenir d’être. Sans hésiter à s’adresser à lui et lui demander aide et réconfort durant des moments intenses de confusion. Il faut savoir aussi que la notion du temps elle-même est entrain de changer. Le temps linéaire va disparaître. Il n’y aura plus d’avant, de pendant et d’après. Nous allons vers un temps également réunifié : un ici et maintenant.

Aussi, nous pouvons dire que nous portons déjà en soi notre être en devenir et c’est pourquoi il est opportun et même important de faire appel à lui pour qu’il nous guide durant cette période. Nous pouvons vivre les choses dans la sérénité et même la joie si nous restons centré en nous, en contact avec notre être divin. Depuis longtemps il est là et nous tend la main, il suffit juste de lui faire confiance, lâcher prise à cet amour qu’il nous transmet et le suivre dans cette magnifique aventure de la vie en évolution.

samedi, janvier 1 2005

L'être d'une femme

La femme est libérée quand l’homme, après avoir été tyran, se fait « tout petit » face à la femme qu’il reconnaît comme étant mère, mère de tout homme, de tout temps, mère-terre, matrice originelle de la vie.

C’est un peu comme si la femme pouvait se libérer des souffrances causées par l’homme en remontant le temps de l’homme jusqu’à le réintégrer en tant qu’enfant. D’où, d’ailleurs, la signification, l’importance d’intégrer en soi la trinité. Intégrer en soi la trinité permet de réintégrer en soi ce qui a été séparé et a causé souffrances : l’homme, l’enfant, la femme. Ce n’est pas seulement intégrer sa propre divinité en étant homme, femme, enfant, mais aussi celle de l’autre. Réintégrer la trinité de l’autre permet de remonter le cours de la séparation, le cours de la souffrance, le temps. De réintégrer et de pouvoir accepter en prenant en soi et de pouvoir pardonner et se libérer de la souffrance et libérer l’être souffrant en soi ; moi, l’autre, les autres …

Et puis il y a le corps. Le corps n’est pas seulement le réceptacle de la vie, il en est aussi la concrétisation. Tant que l’on « subit » passivement la vie, le corps n’est qu’un réceptacle, le réceptacle encore inconnu de ce que l’on croit « être ». Mais si l’on se pose la question de qui l’on est, qu’est-ce que l’on est, alors on commence petit à petit à entamer le chemin de la réintégration. Réintégration est le mot qui convient puisqu’il s’agit d’intégrer à nouveau ce que l’on a été véritablement avant qu’il y ait séparation, c’est à dire tous les aspects de l’être à travers la symbolique de la trinité.

A l’heure actuelle le corps est devenu une des conséquences issues de la séparation : une entité organique vivante partiellement « habitée », parce que partiellement consciente d’elle-même. Comme le morceau d’une planète après explosion qui serait devenue un astéroïde dérivant loin de sa planète d’origine, ayant oublié sa propre identité. D’ailleurs la planète terre ne serait-elle pas dans cette situation ? Le corps est le réceptacle de notre vie, nous sommes notre corps vivant, mais d’une manière partielle seulement du fait que nous avons oublié notre origine donc notre véritable identité.

La manière dont nous habitons notre corps, dont nous le vivons, est à la mesure de la manière dont nous nous vivons nous-même en tant qu’entité vivante « intelligente » : Plus nous nous réintégrons nous-même dans tous les aspects de notre être véritable, plus nous sommes en mesure d’intégrer également notre corps, de l’incarner véritablement, d’en incarner chaque parcelle, chaque particule, chaque infime élément. L’ADN en est l’élément le plus infime et le plus subtil. Intégrer pleinement son corps revient à pouvoir intégrer jusqu’à l’ADN et à devenir le propre créateur de nous-même, ce que nous étions avant qu’il y ait la séparation. Avant la séparation nous étions à la fois créateur et création. Nous nous sommes séparés de nous-même, libre à nous maintenant de nous réintégrer…

Dans le monde concret ici-bas, la réalité est en vérité inversée : le monde extérieur n’est que la manifestation d’une réalité intérieure « incomplète », c’est à dire non pleinement réalisée, tissée de nos peurs et nos illusions. Il faut donc chercher le véritable extérieur à l’intérieur de soi. Le trouver là où il en est pour chacun d’entre nous et s’employer à le faire évoluer pour ensuite pouvoir le manifester dans le pseudo monde extérieur que l’on peut ainsi contribuer à faire évoluer.

mercredi, janvier 3 1996

Perceptions et relations

On est des êtres et on ne sait pas qui on est. On est des êtres qui vivent grâce à ce qui ne vit pas. Grâce au silence. Grâce au vide. Nous sommes perméables à ce qui nous entoure. En nous-même nous portons ce qui est et ce qui n’est pas. De la relation même entre ces deux états, comme de la relation à toute chose, notre vie dépend. La vie n’est pas ce qui est ou ce qui n’est pas. La vie est indéfiniment une relation entre ce qui est et ce qui n’est pas, entre ce qui croit être et ce qui ne semble pas être.

Chaque être porte en lui ce choix de faire exister ou de ne pas faire exister ce qui semble être sans jamais savoir si cela est véritablement. A partir de la relation, la vie est un état. En permanence. En permanence en équilibre instable ou en déséquilibre stable, ce qui revient à la même chose. Ce qui relie l’être à ce qui l’entoure, c’est sa propre perception. De cela, il ne pourra jamais en sortir car sa perception, c’est lui-même.

D’une certaine manière, l’être crée en lui-même sa vie. Lui-même fait exister chaque chose pour avoir ensuite une relation avec elle. L’être définit la relation, il donne vie à la chose. Qu’importe de savoir ce que peut être la chose en dehors de lui. Imaginer ce qu’elle peut être ou peut ne pas être, fait encore partie de la perception. Il ne peut en sortir. La différence de la chose fait partie de lui-même. « L’autre » est en lui. De la relation à cet autre naît la différence de la chose. L’extérieur naît de la relation avec l’intérieur.

Pour chaque être, il n’existe pas d’extérieur absolu ou d’intérieur absolu. Il n’existe qu’un seul absolu, c’est ce qui est à l’origine de sa propre vie. C’est ce qu’il ne peut concevoir car c’est en lui, c’est lui-même. Créer la conception d’un absolu étranger, à l’extérieur de lui-même reviendrait à le déposséder de sa propre vie, ce serait créer l’objet de sa propre destruction. Il est cet absolu. Et à partir de lui-même, il a la liberté de créer sa propre vie. Il est maître de sa propre vie. C’est ce qui lui fait peur. En cela il est seul.

Et pour ne plus être seul, il ne peut que partager cette liberté et non avoir une relation de dépendance. La relation de dépendance est trop facile. Elle détruit. C’est un échange de mort et non de vie. Qui ne veut « mourir » doit affronter cette liberté, cette lucidité.

dimanche, janvier 3 1993

Temps & conscience

En chaque être humain il y a un être concret et un être spirituel. L’être concret, c’est celui qui tend à aimer la vie dans son propre monde. L’être spirituel, c’est celui qui tend à désirer la Conscience, une conscience qui dépasse cette même vie, ce même monde … La vie sur terre n’est pas un aboutissement mais un commencement. Chaque seconde présente est l’aboutissement de la précédente mais le point de départ de la suivante. Incroyable paradoxe qui se répète inlassablement au fil du temps. A la fois étrangement exaltant et horriblement frustrant…l’aboutissement à chaque seconde est celui de l’être concret. Le point de départ pour l’éternelle seconde suivante est celui de l’être spirituel. L’art de la vie consiste à trouver l’équilibre le plus juste, l’harmonie entre les deux êtres, entre les deux mondes différents.

Le monde concret ne doit pas empiéter sur celui de l’être spirituel, sinon c’est l’enfermement. Et de même, l’univers spirituel ne doit pas complètement envahir le monde concret, sinon c’est la déperdition … Dans un monde où le concret s’est trop développé et qui s’est enfermé donc dans son propre temps, l’être, qui se retrouve alors dépendant, prisonnier de ce même temps, doit développer, au-delà de celui-ci un autre espace donc un autre temps dans lequel il puisse trouver la part de vie qu’il a perdue, par lequel il puisse se rééquilibrer, se développer.

Le monde concret enferme, mais il n’est en fait qu’illusoire car il est simplement une densification du temps, c’est-à-dire le résultat d’une conscience particulière… La matière est une densification du temps. Le temps lui-même est en fait une conscience. Il est conscience qui engendre de la conscience. L’espace de la conscience engendre la conscience de l’espace. Plus il y a d’espace de la conscience, plus la conscience de l’espace est grande … Entre l’espace de la conscience et la conscience de l’espace, qu’y a-t-il ? Le temps. Le temps est le décalage entre l’espace et la conscience. Il est comme une brèche ouverte. Il est aussi l’espace offert à la conscience, il est la vie … L’espace d’un côté, la conscience de l’autre. Entre les deux : le temps.

Peut-être la conscience porte-t-elle en elle le désir de l’espace et l’espace l’amour de la conscience. D’où viendrait le temps ? Le temps serait une création de Dieu, une brèche ouverte qui permettrait à la conscience de rejoindre l’espace. Ou alors : le temps se trouverait entre l’espace et la conscience. Il serait aussi grand que l’espace et que la conscience en devenir et, se situant entre l’espace et la conscience, il serait en quelque sorte le miroir de la conscience. Il serait le miroir de la conscience jusqu’à ce que cette dernière soit suffisamment grande et découvre essentiellement que le temps est en fait son propre espace, jusqu’au moment où elle se retourne sur elle-même comme un gant, dépassant ainsi son propre miroir, se libérant enfin, devenant entièrement autonome. C’est-à-dire vivant en elle-même, par elle-même, pour elle-même.

Au moment où la conscience se retournera sur elle-même, le temps ne s’inversera-t-il pas ? Tout ne s’inversera-t-il pas, alors ? Et la conscience, au lieu de rechercher le monde, de se rechercher elle-même, créera son propre monde … Notre perception actuelle du temps, n’est-elle pas fausse ? Si l’on imagine qu’on va vers la vie, alors le temps ne se déroule pas, il est entrain de se remonter. Ceux qui en eux-mêmes défont le temps vont vers la « mort ». Ceux qui en eux-mêmes le remontent vont vers la «vie». Au fond, n’est-ce pas nous-même qui donnons son sens, au temps ? N’est-on pas libre de le décider ? Alors, le cheminement dans le temps serait essentiellement une affaire de volonté ou plutôt de désir même par rapport à la vie.

Le temps est en fait la conscience. Ceux qui défont le temps défont peut-être leur propre conscience. Ceux qui remontent le temps au contraire remontent la conscience. Alors peut-être le temps n’est-il aussi qu’une question de foi : à savoir s’il va vers la vie ou s’il va vers la mort. Peut-être est-on entièrement libre et « responsable » aussi au point de décider cela ? Peut-être chacun doit-il décider pour lui-même et il y aurait autant de possibilités, de vérités que de choix. Peut-être que le temps lui-même en dehors de la conception de son propre sens est la trame gigantesque, infinie qui comporte ainsi en elle-même toutes les possibilités de choix, c’est-à-dire tous les mondes possibles.

Le sens alors qu’on lui donnerait, l’intensité, la valeur qu’on lui accorderait correspondraient en fait au chemin que l’on souhaiterait parcourir soi-même sur son immense trame, chemin plus ou moins grand et soit vers la vie, soit vers la mort … La notion de temps serait ainsi quelque chose d’éphémère et illusoire mais indispensable pour évoluer dans le monde, pour passer d’un monde à un autre. Le temps étant la Conscience, sa notion même serait indispensable car elle serait le recul nécessaire, unique, qui permettrait d’évoluer en lui-même, c’est-à-dire en la Conscience, en le monde.

La notion du temps serait donc un intermédiaire entre la conscience et le monde. Entre une conscience et une conscience. Plus qu’un intermédiaire, il serait un moyen de communication, un « outil » même pour la conscience. Le temps n’existe pas en lui-même mais il représente en quelque sorte la conscience du monde. Il est la trame du monde. Inversement, la conscience existe en elle-même, mais elle n’existe pas de manière « figée », fixe. Elle est en quelque sorte vivante, mobile. Aussi, le temps serait véritablement la trame par laquelle la conscience pourrait non seulement « voyager » dans le monde, mais aussi « communiquer » avec lui. Donc le temps n’existe pas, il est la trame du monde, il en est la conscience fixée, déjà « morte ». Cependant, s’il n’existe pas, c’est la conscience individuelle qui lui donne vie. Aussi, elle le fait vivre, lui donne vie partout où elle se déplace dans le monde.

Le véritable monde n’est pas dans le temps qui s’écoule, il est dans le temps qui s’est déjà écoulé, que ce soit dans le passé ou dans le futur car le monde ne se trouve pas dans la conscience, mais c’est la conscience qui vit dans le monde. Le véritable monde, ce n’est pas ce que je perçois, c’est ce que je ne perçois pas. Il n’est pas ce que je le crois être, il est ce que je ne l’imagine pas encore être. Il est ce que je peux créer à partir de ce que moi-même je suis, à partir de ma propre conscience dans laquelle donc il ne se trouve pas, mais qui peut justement d’après sa vérité à elle-même, en elle-même, le révéler. La conscience révèle le monde, et l’être le crée…

Le monde concret qui enferme serait donc le résultat dune « densification » du temps, de la conscience. Comment faire pour se libérer ? Il faudrait donc opposer au temps qui enferme la conscience qui ouvre. C’est peut-être pour cette raison alors qu’il faut aimer, que l’on ne peut qu’aimer la matière de ce monde. Et pour pouvoir aimer cette matière il faut retrouver sa profonde vérité, sa propre raison d’être. Or, trouver cette raison d’être c’est traverser l’espace, c’est « remonter » le temps de la matière. C’est vouloir découvrir son origine. Comme l’origine de toute chose, n’est-ce pas ce qui se trouve aussi en nous-mêmes ? Alors c’est du domaine de l’esprit, alors on retrouve la conscience. La conscience qui cherche la libération, qui veut dépasser l’enfermement de la matière et donc qui veut, qui doit comprendre cette même matière, se retrouve face à la Conscience. Face à Dieu …