Journal d'une ménagère zébrée

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mercredi, juin 29 2005

Escale

La peur de se noyer
Dans un verre d’eau fatiguée
Je plonge mon regard
Dans la transparence voilée
Si terne le récipient
Qui me sert de pensée
Je ne peux que nager
Dans une eau claire imaginée
Et je me laisse bercer
Par le reflet inspiré
En partance d’un port égaré
Quelque part
Loin des amarres déchirées
Trop de vagues ont brisé la coque de l’âme
Qui dérive au large
D’un pays sans passé
A bord d’un océan qui s’est retourné
Jusqu’à la dernière goutte j’ai bu
Le chemin enroulé au fond de la soute
Qui révèle l’endroit où l’eau sèche le doute
Le rien marin d’où émerge la soif profonde

mercredi, juin 22 2005

Coffre-fort

Mon corps s’ouvre
Mon corps s’offre
Au discours qui court
En écho sonore
Au fond de mon cœur
En coffre-fort
Qui s’efforce et fond
La douce tiédeur
D’un mot mi-rêveur
Et s’enfonce la pluie d’or
Dans la cave sans fond
De mon âme qui dort
Pendue au plafond
Rendue aux bas-fonds
D’une vie éperdue
Une à une s’allument
Les lumières saturées
Déroulant le sillage
D’un passage retrouvé
A travers l’ombre égarée
En début et fin de monde
Les visages sans âge
Les regards sans égard
Le corps qui souffre
D’un cœur en coffre-fort

dimanche, décembre 5 1999

Astre platine

La musique pluie
De graine jubile
Me traîne
Me grave
Sur l’astre platine
Et tourne la surface
Lisse
Les âges condensés
En moments séquences
De vie émouvante
Les univers défilent
Des planètes immobiles
Le temps défend sa danse
– « Oh temps suspens ton envol » –
Envole moi mais
Vers l’espace nostalgique
Plaquée sur une phrase
Émerveillée
Et entière
Entièrement transe
Transpirant
La joie de rêve
Oh tournent les bras
Simplement d’ivresse
Autour du moment
Autour d’autour
En geste d’amour
Le ruban sentiment
Se referme
S’éprend
Autour de lui-même
La puissance émotive
S’élève
D’un simple consentement
A être
Un lâcher prise nonchalant
A être possible
Être possible 
Oui
Mais la musique attend
La muse de l’innocent
Pour le guider
Par les liens de la pensée
La fibre
Qui vibre
La fibre brillante
Comme l’eau de la pluie
De la neige
D’un monde endormi
Sous terre cachette
En partie caché
Dans la musique
Caché dans le rythme
Qui entraîne
Le rythme qui veut dire
Et la mélodie
Forme des images
Paysage sur paysage
Âme après âme
Sur pages à tourner
Et papier à écouter
Bruire
Bruire comme le ruisseau
Discret
Au fond de la vallée
Caché
Au fond du corps
Endormi
En masse immense
Inerte qui soupire
– Sa musique –
Qui soupire en musique 
Muse du désir
Des secrets à dire
–  Plus tard –
Aux fenêtres ouvertes
Sur le fond de la vie
Au bord du son
Qui va s’évadant
Qui s’évase
D’oreille interdite
En cœurs impatients
–  Le cœur de musique –
En écho
     écho
     écho éclatant …

vendredi, décembre 1 1995

Valse trouble

Le monde est à 1'image
De toute âme condamnée
A errer sans repères
Perdue dans l'univers
Vaste prairie sans arbre ni abri
Où règnent le silence 1'absence et les cris
Vaste terrain vague à vagues humaines
Où les êtres se cherchent se touchent et se fuient
Sans voir ni savoir où tout commence et finit
Infinissable piste de danse
En friches et sans limites
Où s'élèvent et s’achèvent
Les mouvements de la vie
L'harmonie se pose et s'emporte
Rassemble et détruit
Tout élan sentiment et désir
Danse infinie et inquiète
Qui  avance et répète
Le mystère de son rythme
Un pas dans le vide un pas dans le rêve
Un mot d'émotion un cœur qui  oscille
Un pas qui dit oui un pas qui dit non
Et le monde vacille entre amour et folie...

Valse

Valse multicolore
Déferlement vaste
Des multiples corps
La vie se réclame
A coup de décors
Les désirs s’enchaînent
Sous un moindre effort
Rêveries sonores
A différentes thèmes
La musique invite
Toute âme qui traîne
Les regards s’attirent
Sur un jeu de rythmes
Et les cœurs s’étirent
Sous un ciel fébrile
Les douleurs faiblissent
Par le feu du rire
Les peurs se retirent
En un doux soupir
Et encore une heure
De tiède délire
        Et encore une heure
        A n’en plus finir
        Et encore une heure
        Jusqu’à en mourir …

jeudi, janvier 5 1995

La Grande Miraculée

Je suivais avec passion
La Grande Miraculée
Dans son dessin sans raison
Au centre du monde déchiré
Tourbillon obsédant
Dans le bain du sang étalé
Sillon étrange et glacé
Qui se répète inlassablement
Dans le creux des choses égarées
Recoupe et rassemble
Les particules mélangées
Cette pluie fine et déchaînée
Dans l’espace surchauffé
Inquiétante cadence
Qui l’on ne peut arrêter
La fiévreuse danse
Qui déplace les mondes exaltés
Sur le sinueux et complexe
Chemin de la Grande Miraculée
Je suivais la course dangereuse
Et folle de la vie passionnée
La petite flamme du feu éternel
Qui traverse les multiples univers
Sans repos sans faiblesse
Et empile les mondes les êtres les âmes
S’appliquant à construire des châteaux
De plus en plus beaux
De plus en plus vastes
C’est avec passion
Que je suivais
La Grande Miraculée
Je ne savais pas où j’allais
Où j’allais aller sans raison
Au centre du monde déchiré
La vie s’accélère
Elle n’en peut plus de briller
Dans le bain du sang étalé
L’univers se déforme et s’agrandit
Les êtres s’affolent
Les âmes s’alourdissent
Tourbillon obsédant et enivrant
La fiévreuse danse
Qui déplace les mondes exaltés
Le château se construit
Toujours plus beau
Et plus fragile
Pas de repos
Pas de faiblesse
La mort
La mort
Se transforme
Aussi…

lundi, janvier 2 1995

Voyage maritime

Bleu-vert, bleu-vert, bleu-vert,
l'âme se soulève et plonge dans la mer
éparpillement subtil des gouttelettes de rêve.
Bleu-vert, bleu-vert, bleu-vert,
enlisement secret dans la masse amère qui veille,
éclatement rebelle de particules d'ivresse.
Bleu-vert, bleu-vert, bleu-vert,
avancée insolite dans la coulée de mystère,
le repère magnifique aux parois fragiles de verre,
de verre liquide, mobile, qui s'emplit, qui se vide,
qui s'emplit, qui se vide,
bleu-vert, bleu-vert, bleu-vert,
voyage tranquille dans le rythme infini
qui s'amasse, enlace, délaisse, délasse,
la pensée arrêtée, enlevée, oubliée,
bleu-vert, bleu-vert, bleu-vert,
attachement-détachement, attachement-détachement
…détachement, éloignement, loin, là, là-bas,
dans le reflet calme, sage, du miroir qui s'étale,
large, si large,
et porte et emporte la vie, le rêve, l'âme, le regard,
bleu-vert, bleu-vert, bleu, bleu…

........ Version sonore sur YOUTUBE ........

lundi, février 22 1993

Farandole

Tout tourne : les choses les gens
les souvenirs et le reste
tout valse en folie trouble
comme un rêve qui se dédouble
lentement à la langueur de la planète
lentement à la langueur de l’immense devinette
cercle court qui heurte le fond de la tête
et se répète et répète les mauvais jours
et se resserre
se resserre en temps coulant
qui force le mensonge et les détours
se resserre en nœud de cravate
autour des cous devenus raides
des nuques lourdes et pieds qui traînent
les pieds qui traînent du prisonnier
qui tourne autour de lui-même
ne pouvant tourner plus court
dans la cour de la prison blême
les pieds qui traînent du soldat blessé
avant la guerre blessé d’être né
blessé de son propre rêve
qui tourne en roue amère
ramenant les mêmes promesses
les mêmes trous
trous de la pensée qui se délaisse
trous des désirs qui grandissent incompris
trous de la terre qui se dévide d’elle-même
et celui du soleil qui brille
qui brille de sa lumière
la lumière circulaire autour de la tête
de l’être visionnaire et unique
seul être qui aurait su enrayer peut-être
le profond maléfice qui s’enroule
ou déroule l’agonie
indéfini infiniment long
en serpent éternel
autour de l’axe fixe originel
plongé au fond du cœur vivant
et vivant lui-même en œil fixe
ouvert sur le monde
ouvert comme l’œil du poisson mort
indécent et rond...

.......... Version sonore sur YOUTUBE ..........

vendredi, janvier 10 1992

Cacophonie

Marasme musical
Nécessaire folie à déranger l’univers
La musique amère glisse vers la nuit
Elle cherche l’unité manquant à son avenir
Comme les morts sortiront des mots
Les mots sortent de leur note
Le langage plie et se désaccorde
En une anachronique symphonie
La disharmonie s’extirpe des cordes
De corps en corps tendus à gémir
Et évoque par effet de discorde
L’enfer du désordre des hommes à venir
Le fil sinuant à la limite du bruit
Entre dans l’antre de l’âme à l’agonie
Le souffle colérique emplit l’espace à l’écoute
Et déborde hystérique et fou
Dans le paradis fermé de la conscience endormie
De toute la violence concentrée
En sa nudité atomique
Le fluide magnétique et trouble
Bouleverse l’ordre synthétique du jour
Le concert métallique sonde l’atmosphère
Et la soulève la froisse de sa main de fer
Pour faire éclater en une fleur de sang et de rêve
Le marasme pathétique qui fige la planète.

Deuil

Je m’approche 
	Seule
De la porte
	Le sort
	M’accroche
M’emporte la mort
Au seuil d’or
Au deuil dort
De corps en fleurs
De cœurs endoloris
Affichés panoplie
Sur visages massifs
Le marbre pâli
Les arbres
La terre
Roche passive
Qui décroche
	Linceul
La courte valse
Et courte écoute
D’écho des corps
Tous seuls
Sur le sol
De sel
Du sang
Qui s’écoule
	Goutte
	A goutte
Dans la salle 
	Endormie
De la chair
	Qui attend
De la chair
	Qui attend
	De vivre
	Qui attend
Puis de pourrir…

dimanche, janvier 5 1992

Dévidoir

La terre se déroule
Et s’emporte loin d’elle-même
Comme une toupie désaxée
Qui cherche le vide

L’être humain se désaxe
Et sort de lui-même
Les sentiments se désorientent
Les idées tourbillonnent

L’humanité a perdu sa boussole
Le sens magnétique qui engendre la vie
Ce courant si faible si fort et unique
Qui permet de garder le fragile équilibre

Et l’être s’affole dans la folie de la haine
La haine de la haine
La haine de lui-même

Le monde se tord
Comme un serpent hystérique

La bête s’enroule
Et rapproche les limites

Le temps se déforme
Courbe l’échine

Le passé revient
Tel un vent de tempête

Un immense miroir
Descend de l’espace

Le plafond saturé
D’actes et de pensées

Il descend doucement
Vers les têtes égarées

Comme un reproche désolé
Qui bientôt va s’écraser…