On est des êtres et on ne sait pas qui on est. On est des êtres qui vivent grâce à ce qui ne vit pas. Grâce au silence. Grâce au vide. Nous sommes perméables à ce qui nous entoure. En nous-même nous portons ce qui est et ce qui n’est pas. De la relation même entre ces deux états, comme de la relation à toute chose, notre vie dépend. La vie n’est pas ce qui est ou ce qui n’est pas. La vie est indéfiniment une relation entre ce qui est et ce qui n’est pas, entre ce qui croit être et ce qui ne semble pas être.

Chaque être porte en lui ce choix de faire exister ou de ne pas faire exister ce qui semble être sans jamais savoir si cela est véritablement. A partir de la relation, la vie est un état. En permanence. En permanence en équilibre instable ou en déséquilibre stable, ce qui revient à la même chose. Ce qui relie l’être à ce qui l’entoure, c’est sa propre perception. De cela, il ne pourra jamais en sortir car sa perception, c’est lui-même.

D’une certaine manière, l’être crée en lui-même sa vie. Lui-même fait exister chaque chose pour avoir ensuite une relation avec elle. L’être définit la relation, il donne vie à la chose. Qu’importe de savoir ce que peut être la chose en dehors de lui. Imaginer ce qu’elle peut être ou peut ne pas être, fait encore partie de la perception. Il ne peut en sortir. La différence de la chose fait partie de lui-même. « L’autre » est en lui. De la relation à cet autre naît la différence de la chose. L’extérieur naît de la relation avec l’intérieur.

Pour chaque être, il n’existe pas d’extérieur absolu ou d’intérieur absolu. Il n’existe qu’un seul absolu, c’est ce qui est à l’origine de sa propre vie. C’est ce qu’il ne peut concevoir car c’est en lui, c’est lui-même. Créer la conception d’un absolu étranger, à l’extérieur de lui-même reviendrait à le déposséder de sa propre vie, ce serait créer l’objet de sa propre destruction. Il est cet absolu. Et à partir de lui-même, il a la liberté de créer sa propre vie. Il est maître de sa propre vie. C’est ce qui lui fait peur. En cela il est seul.

Et pour ne plus être seul, il ne peut que partager cette liberté et non avoir une relation de dépendance. La relation de dépendance est trop facile. Elle détruit. C’est un échange de mort et non de vie. Qui ne veut « mourir » doit affronter cette liberté, cette lucidité.